Violences sexistes et sexuelles : Courrier intersyndical
CFE-CGC | CFDT | CFTC | FO | CGT | Solidaires | FSU | UNSA
Date
CFE-CGC | CFDT | CFTC | FO | CGT | Solidaires | FSU | UNSA
Madame la Première Ministre,
Grâce à la mobilisation syndicale et féministe, l’OIT a adopté, en juin 2019, la première loi mondiale contre les violences sexistes et sexuelles, la convention 190 et la recommandation 206. En France, suite aux propositions de nos organisations dans le cadre des concertations de 2018, ont été mis en place des référent.e.s harcèlement sexuel et agissements sexistes, une obligation de négociation sur les violences sexistes et sexuelles dans les branches et l’obligation de traiter des Violences sexistes et sexuelles (VSS) dans le document unique d’évaluation des risques professionnels. En 2018 toujours, un accord Égalité femmes /hommes a été mis en œuvre dans les trois versants de la fonction publique avec la création de référent.e.s VSS.
Nos organisations syndicales ont amplifié leur travail sur le sujet et nous accompagnons de plus en plus de victimes de violences sexistes et sexuelles, même si nous avons toujours bien sûr à progresser. Cependant, 5 ans après #metoo, nous constatons que la majorité des situations restent toujours aussi difficiles à régler. Au lieu de suspendre, puis de sanctionner le salarié mis en cause, on continue souvent de déplacer, discréditer, voire placardiser ou licencier la victime. Les politiques de prévention sont encore souvent inexistantes ou insuffisantes dans la majorité des entreprises, administrations, collectivités et établissements publics. Il y a rarement des dispositifs formalisés de signalement et d’enquête, associant les représentant.e.s du personnel. Dans la fonction publique, la mise en place des cellules d’écoute est un premier pas, mais le manque de financement et de personnels dédiés a pour conséquence qu’elles ne sont pas assez opérationnelles.
Mis en place sans moyens dédiés ni prérogatives clairement définies, les référent.e.s VSS du privé ou de la fonction publique cumulent cette charge avec celle d’élu.e au CSE ou au comité social et ne disposent pas de crédits d’heures de formation spécifique. Ils et elles pâtissent de la suppression des CHSCT et des délégué.e.s du personnel qui permettaient d’avoir une instance spécialisée dans la prévention et des représentant.e.s de proximité. Malgré le vote du Parlement, votre gouvernement n’a toujours pas finalisé la ratification de la convention 190 de l’OIT et souhaite le faire a minima, sans modifier le droit national. Les recommandations de l’OIT sont donc restées lettre morte.
Au vu de l’ampleur des violences sexistes et sexuelles, nous refusons de nous satisfaire du statu quo. À la veille de la journée internationale contre les violences faites aux femmes, nous vous interpellons sur la nécessité d’avancer concrètement.
Nous vous appelons à ratifier au plus vite la convention 190 de l’OIT et à mettre en œuvre ses dispositions ainsi que celles de la recommandation 206 qui l’accompagne. Nous souhaitons que soit organisée une table ronde multilatérale pour réaliser un bilan des quelques mesures mises en place depuis 2018 et identifier les nouvelles dispositions à adopter.
Au-delà, nous souhaitons que soit construit, par exemple par le Haut Conseil à l’Égalité, un baromètre annuel pour évaluer le ressenti des salarié.e.s et des agent.e.s sur les violences sexistes et sexuelles au travail et ainsi nous donner des indications objectivées sur l’état de la prise en compte du sujet.
Nous vous rappelons les propositions que nous avons portées ensemble lors des concertations de 2018 et à l’occasion de la ratification de la convention 190 de l’OIT et qui restent malheureusement d’actualité.
Restant à votre disposition pour tout échange complémentaire, nous vous remercions d’avance de l’attention et des réponses que vous voudrez bien accorder à ces demandes et vous prions d’agréer, Madame la Première Ministre, l’expression de nos sentiments les meilleurs.
Mireille Dispot
Secrétaire nationale confédérale CFE-CGC en charge de l’Égalité des chances
Sophie Binet
Dirigeante confédérale de la CGT, pilote du collectif « Femmes mixité »
Béatrice Clicq
Secrétaire confédérale de la CGT-FO, en charge de l’Égalité et du développement durable
Pascale Coton
Vice-présidente CFTC en charge de l’Égalité femme homme
Sigrid Gérardin
Secrétaire nationale de la FSU, co-animatrice du secteur Droits des femmes
Murielle Guilbert
Co-déléguée générale de Solidaires et co-animatrice de la Commission femmes
Béatrice Lestic
Secrétaire confédérale de la CFDT en charge de la Politique en direction des femmes en termes d’égalité professionnelle, de condition féminine et de mixité
Émilie Trigo
Secrétaire nationale « Libertés, égalité femmes-hommes, défense des droits humains, lutte contre les discriminations »