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NAO pharmacie : les raisons du droit d’opposition de la CFE-CGC

Pour la première fois de son histoire, la CFE-CGC de l’industrie pharmaceutique a exercé son droit d’opposition à un accord de branche sur les salaires minimaux conventionnels. Analyse de ses motivations.

« Le Leem (syndicat patronal des industries du médicament) joue depuis avril 2022 une partie de misérabilisme avec les organisations syndicales du secteur de la pharmacie. » Les mots de François Reyrolle, représentant de branche CFE-CGC pour l’industrie pharmaceutique, sont durs. C’est lui qui a négocié avec le Leem lors de plusieurs réunions paritaires (7 avril, 12 mai, 21 juillet 2022) et qui a vu se crisper un accord sur les minimas salariaux conventionnels, signé par les seules CFDT et UNSA, le 8 septembre.

DES AUGMENTATIONS INDIGENTES ALORS QUE L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE EST UN DES SECTEURS LES PLUS PROSPÈRES DU PAYS :

« Un accord inacceptable, fustige-t-il, puisqu’en couronnement de ses propositions indigentes, le Leem a finalement obtenu deux signatures pesant 33 % de représentativité pour augmenter, tenez-vous bien, de +2,4 % les minimas des salariés de la branche touchant moins de 2 000 euros par mois, et de +0,5 % ceux des 85 % restants, soit 12 fois moins que l’inflation ! C’est pour ces raisons que nous avons fait valoir, avec la CFTC et la CGT, totalisant 52 % de la représentativité, notre droit d’opposition. »

Adressée le 28 septembre aux organisations syndicales signataires et au directeur général adjoint du Leem, Pascal Le Guyader, la lettre d’opposition de la CFE-CGC souligne que « l’industrie pharmaceutique est un des secteurs industriels les plus prospères dans notre pays ». Elle met le doigt sur le fait qu’en revalorisant pour des clopinettes les minimas conventionnels se situant au-delà de 2 000 euros ou du niveau 4B (premier niveau de la classification repère niveau Bac / Bac +2), l’accord « a pour effet de tasser les coefficients vers le bas, ce qui est contraire au bon maintien d’écart hiérarchique repère entre les différents niveaux ».

 

« C’est bien la première fois que les géants du secteur se préoccupent du sort des petites entreprises qu’ils ont plutôt tendance à pressurer ou avaler en temps normal. »

 

Dans sa réponse du 11 octobre, le Leem s’abrite à plusieurs reprises derrière « un contexte économique incertain » pour justifier sa position. Il indique aussi que « les résultats financiers de certaines entreprises de la branche ne sont pas révélateurs de la situation économique de l’ensemble de celles qui la constituent ». Autrement dit, que les bénéfices énormes des Big Pharma ne doivent pas masquer les difficultés des PME. « C’est bien la première fois que les géants du secteur se préoccupent du sort des petites entreprises qu’ils ont plutôt tendance à pressurer ou avaler en temps normal », ironise le négociateur CFE-CGC.

Autre argument de la partie patronale, le fait que « le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) entrainerait, pour l’année 2023, une contraction du budget médicament de 3,4 milliards d’euros par rapport aux dépenses réelles nettes qui devraient être constatées fin 2023 ». « Par moments, on se demande s’il ne s’agit pas d’un chantage cynique de la part du Leem vis-à-vis des autorités gouvernementales, s’étonne François Reyrolle. Sur le thème : comme vous ne voulez pas augmenter le prix des médicaments et que nous devons supporter des hausses de prix de production, nous n’avons plus assez de liquidités pour augmenter les salaires. C’est oublier que le secteur est en croissance, qu’il a bénéficié de nombreux cadeaux fiscaux et que ses niveaux de marge se situent souvent à plus de 30 %… »

Le Leem a par ailleurs avancé que l’opposition de la CFE-CGC privait les salariés de l’augmentation de la prime d’ancienneté au deuxième semestre 2022. Une hausse qui se serait montée à un euro pour 10 ans d’ancienneté, selon le calcul de François Reyrolle. Et à deux euros pour 20 ans. « C’est se moquer du monde et afficher un mépris pour l’ensemble des salariés, alors que la Pharmacie est une branche riche », conclut le militant. Prochaine étape : une nouvelle discussion sur les minimas conventionnels, le 17 novembre.

Gilles Lockhart

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