Sûreté nucléaire : la CFE-CGC opposée à un démantèlement de l’IRSN
L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) est menacé de démantèlement. La CFE-CGC alerte.
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L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) est menacé de démantèlement. La CFE-CGC alerte.
Le Ministère de la transition énergétique a annoncé, le 8 février, vouloir réunir les compétences techniques de l’IRSN avec celles de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). La ministre, Agnès Pannier-Runacher, a demandé au président de l’ASN, à l’administrateur du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et au directeur général de l’IRSN, de lui proposer des mesures pour mettre en œuvre ce projet. L’objectif semble être de les intégrer sous forme d’un amendement, fin février, dans le projet dit « loi d’accélération du nucléaire », présenté en Conseil des Ministres le 2 novembre 2022 et adopté par le Sénat en première lecture le 24 janvier 2023.
Peu connu du grand-public, cet institut emploie 1750 salariés, à 75 % des cadres, dont un grand nombre d’experts de haut niveau, ingénieurs, docteurs, doctorants, chercheurs. L’Institut est l’expert technique en sûreté nucléaire mais également en sécurité des installations ainsi qu’en protection de la population et de l’environnement contre les risques apportés par les rayonnements ionisants. Il apporte son expertise aux autorités de sûreté, civile (ASN), de défense (DSND) et de sécurité (HFDS) mais également à tous les services centralisés ou décentralisés de l’Etat ainsi qu’à la société civile ou à un simple citoyen qui en ferait la demande (exemple : mesure de radon radioactif dans sa cave).
Le « découpage » éventuel des effectifs est encore flou. Une partie des salariés, experts généralistes, spécialistes, éventuellement chercheurs, rejoindrait l’ASN, certainement friande d’intégrer ces compétences techniques dans le cadre de la relance du nucléaire. Les autres chercheurs reviendraient au CEA qui n’est pas particulièrement demandeur. Et il risquerait de rester un certain nombre d’oubliés, dans la liste des nombreuses missions qui incombent à l’IRSN.
Représentative avec la CGT et la CFDT, la CFE-CGC de l’IRSN a formé contre cette menace une intersyndicale « très harmonieuse », dixit Luc Codron, délégué syndical central à l’IRSN, ingénieur en sûreté nucléaire et président délégué du SICTAM, le syndicat qui regroupe les adhérents du CEA, de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) et de l’IRSN. L’intersyndicale a été reçue par Agnès Pannier-Runacher le 17 février pendant près de deux heures. Plus de 500 salariés de l’IRSN ont fait grève le 20 février et près de 300 ont posé une demi-journée de congés pour notamment manifester devant le ministère de la Transition énergétique.
Dans une lettre ouverte à la ministre de la transition énergétique, le 19 février, l’intersyndicale a alerté sur les risques liés au démantèlement de l’IRSN :
La CFE-CGC a en particulier obtenu, de concert entre les 8 administrateurs salariés de l’IRSN, que le conseil d’administration de l’IRSN vote le 16 février par 18 voix contre 4 une motion d’alerte au gouvernement. Cette motion appelle à la vigilance sur le risque de départs du personnel de l’IRSN pouvant entraîner une paralysie du système de contrôle en radioprotection et sûreté nucléaire, et elle rappelle, entre autres, que les domaines de recherche et d’expertise de l’IRSN concernent également la protection des travailleurs, de la population et de l’environnement contre les rayonnements ionisants.
Le CSE extraordinaire de l’IRSN du 21 février n’a rien apporté. Près d’un millier de salariés se sont réunis dans l’après-midi en assemblée générale du personnel. 210 dans l’auditorium et 423 par Teams ont voté pour une journée de grève le 28 février et une manifestation devant l’Assemblée nationale, où l’amendement pourrait être déposé en commission. L’intersyndicale poursuit en parallèle son action intensive auprès des médias et des parlementaires.
La Confédération CFE-CGC et la Fédération de la Métallurgie CFE-CGC soutiennent les salariés placés brutalement dans l’incertitude quant à la poursuite de leurs missions. Elles demandent que l’ensemble des parties prenantes puissent s’exprimer sur les perspectives d’évolution de l’organisation de la sûreté nucléaire et de la radioprotection avant toute décision affectant l’IRSN.
Gilles Lockhart